
De nombreuses initiatives liées à la durabilité ont été lancées sur le campus de l’EPFL ces dernières années. Parmi elles, des associations étudiantes comme Zero Emission Group, mais aussi des projets MAKE engagés comme Genorobotics ou encore Sailowtech. Un groupe d’étudiants et étudiantes a décidé de créer une compétition sur le campus afin de rassembler ces initiatives venant de toute l’Europe, les motiver et les promouvoir. Nous avons rencontré Victor Pennacino, organisateur de la Sustainable Innovation Competition (SIC).
Présentation
Victor Pennacino est en master de Robotique à l’EPFL. Pendant deux ans, il a été un membre actif de l’EPFL Carbon Team, travaillant sur les prototypes de capture de CO2 de l’association, mais aussi sur la modélisation des procédés, puis occupant le poste de vice-président.
Depuis, il s’est lancé dans l’organisation d’un événement prenant place sur le campus : The Sustainable Innovation Competition!
La Carbon Team m’a appris beaucoup sur la Climate Tech, que ce soit son potentiel mais aussi ses limitations, qui sont très nombreuses.
Qu’est-ce que The Sustainable Innovation Competition ?
Victor: C’est une compétition sur la technologie durable, qui a pour but d’impliquer les étudiants dans ce domaine, en récompensant leur travail passé, en leur offrant des opportunités de s’investir maintenant dans leur vie associative, mais aussi des opportunités pour leur futur professionnel.
Un autre point important, c’est d’éduquer par rapport aux limites du technosolutionnisme. Pour moi, ça doit vraiment être fondamental d’investir et de faire en sorte que les gens travaillent dans ce genre de domaines, mais il y a tout un travail à faire au niveau de la réduction de la croissance et de la consommation. Quand on regarde les rapports du GIEC par exemple, on peut voir que ce n’est pas suffisant de simplement investir à fond dans les technologies du climat.
On aimerait aider les étudiants qui ne savent pas forcément où travailler alors qu’ils aimeraient s’engager dans la durabilité. Leur donner des opportunités dans des bonnes boîtes, avec des gens qui ont de bonnes initiatives. Je pense qu’on ne répond actuellement pas à ce besoin à l’EPFL.
Comment est venue l’idée d’organiser une compétition?
Victor: L’idée nous est venue à travers la participation qu’on a eue avec la Carbon Team au XPRIZE Carbon Removal : un prix organisé par la fondation XPRIZE pour récompenser les solutions de captage, d’utilisation et de stockage du carbone. On a eu un très bon classement, top 100 sur plus de 1300 équipes. On était la seule équipe étudiante du top 100. Ça a fait trop plaisir ! Cette expérience nous a fait remarquer que ce genre d’événements et de compétitions sont super fédérateurs. C’était la première fois que notre association a pu participer à une compétition comme celle-là.
On s’est dit avec d’autres étudiants de la Carbon Team qu’il n’y a pas beaucoup d’événements ou de compétitions de ce genre pour les projets étudiants qui travaillent sur les technologies durables. Je parle des projets comme Rebuilt, Sailowtech, ou encore des pôles d’associations comme XPlore qui ont aussi un prototype pour le recyclage de PETG et de matériaux 3D. Il y a énormément de projets, et pourtant, il n’y a pas de compétition contrairement à la plupart des autres projets MAKE comme la Rocket Team ou la Racing Team.
Quand on parle aux gens qui ont participé à ces événements, on se rend compte qu’ils sont très fédérateurs également et offrent plein d’opportunités aux participants que ce soit de l’ordre professionnel ou simplement pour rencontrer d’autres personnes qui sont motivées de la même manière. Tout ça pour dire qu’on a trouvé qu’il y avait un manque là et l’idée c’était de faire une compétition sur la technologie durable.
Quand et où se déroulera la première édition?
Victor: Tout se passe bien pour l’instant, donc on aimerait organiser cet événement pour mars 2025, juste après la semaine de la durabilité. L’objectif c’est que ça se passe sur le campus. On s’est inspiré d’événements comme Vivapoly, qui sont super cool avec une ambiance chaleureuse, et en même temps mélanger avec des événements un peu plus pro comme le Forum. On aimerait faire ça au milieu du campus, au sein du Rolex même. On est entrain de discuter aussi pour avoir d’autres salles à droite à gauche, pour que ça soit un événement à l’échelle du campus. On est entrain de réfléchir à ça, mais pour nous c’est vraiment un hybride entre Vivapoly et le Forum mais sur le thème de la durabilité.
Quel format prendra cet évènement?
Victor: Il y aura deux parties principales dans cet événement.
D’abord, pendant la journée, il y aura un forum avec des stands d’entreprises, de laboratoires, de centres de recherche mais aussi des associations et projets MAKE et les équipes participant à la compétition, qui seraient là pour faire des démonstrations de leur technologie. Comme au forum, les étudiants pourront venir discuter, trouver des stages, et voir les démonstrations des technologies. C’est important que les gens puissent montrer des éléments de leur technologie, et pas seulement des chiffres sur une slide.
La deuxième partie de l’événement sera la compétition : il y aura plusieurs catégories et à la fin de chaque journée un moment y sera dédié le soir. Pendant environ une heure, une heure et demie, il y aura des pitchs de présentation accompagnés de bouts d’éléments de technologies. Un jury sera là pour délibérer.
Qui va participer à la compétition? Seulement des associations de l'EPFL, ou ça sera ouvert à tout le monde ?
Victor: L’idée c’est de faire un événement international à long terme, vu qu’on espère que ça se passera sur plusieurs années. On aimerait ouvrir au monde entier mais pour la première année on se concentre sur l’Europe. C’est aussi un moyen d’avoir plus de temps pour répondre à des questions éthiques du style : comment est-ce qu’on va faire participer des équipes de Boston sans qu’elles viennent en avion. On n’a pas encore le temps de réfléchir ou de répondre à ces questions donc on se concentre sur l’Europe. On aimerait donner des subventions aux équipes étudiantes pour qu’elles voyagent avec des moyens de transport verts.
Quelles catégories y aura-t-il?
Victor: Pour l’instant, il y a deux catégories qu’on est entrain d’explorer. Un prérequis pour qu’une catégorie existe c’est d’avoir une équipe sur l’EPFL qui participe dedans. Par exemple, pour les catégories qu’on envisage il y aurait une catégorie hard tech qui inclurait le CDR (Carbon Dioxide Removal) avec la Carbon Team et une catégorie low tech où pourraient participer des associations comme Rebuilt. On aimerait avoir un minimum de 4 équipes par catégorie.
En quoi consistera la compétition?
Victor: Le but de chaque équipe est de pitcher sa tech et de remplir des critères scientifiques. Par exemple, pour la Carbon Capture il faudra avoir une LCA (Life Cycle Assessment), une projection sur le long terme de combien de CO2 la technologie peut capturer, et pouvoir montrer si c’est scalable ou non. Il faudra aussi présenter un résumé de comment l’association travaille en équipe, quel est le projet et simplement vendre un peu la vision générale du projet.
La décision finale sera basée sur la moyenne des notes du pitch de chaque équipe et du rapport scientifique. L’idée serait d’avoir un cash prize pour les gagnants, et on aurait potentiellement un accompagnement aussi par des mentors si les gens veulent créer une start-up ou un nouveau projet avec leurs technologies.
Comment allez-vous montrer les limites des technologies des participants?
Victor: Il y aura des intervenants, mais aussi un travail de réflexion demandé aux équipes participantes, comme cela a été le cas pour la Carbon Team pendant le XPRIZE. Par exemple, pour les intervenants, nous avons des contacts avec un professeur qui a contribué à l’écriture du rapport du GIEC, ainsi que de nombreuses autres personnes travaillant dans des entreprises et connaissant bien ces limites.
Où en est le projet actuellement?
Victor: On a parlé autour de nous et ça a pris de l’ampleur. On a reçu des financements de la part d’un Booster d’Innosuisse pour lancer le projet, et on est entrain de demander d’autres financements. Mi-octobre, on devrait pouvoir lancer notre site et un appel à projets.
Qui organise la SIC avec toi?
Victor: C’est des étudiants, que des étudiants. On est un peu épaulés par l’administration de l’EPFL pour la logistique, mais tout le reste est organisé par des étudiants, comme c’est le cas pour le Forum par exemple.