Qu’est-ce que votre formation scientifique vous apporte dans votre travail ?
Ma formation est alignée avec ce que je fais aujourd’hui. Je pense que connaître la science sous-jacente permet de faire des choix plus renseignés en matière de durabilité. Par exemple pour les choix de matériaux, je comprends précisément les implications du point de vue chimique. La science nous donne des connaissances de base, le respect de l’environnement s’oriente ensuite selon la sensibilité de chacun.
En quoi consiste votre rôle ?
Je conseille les aspects de durabilité. J’accompagne la planification des deux nouveaux bâtiments, un dédié à l’enseignement avec quatre amphithéâtres « Projet Double-Deck », et un bâtiment de recherche haute technologie « L’Advanced Science Building » (ASB). Ces constructions vont être certifiées avec un label de durabilité ‘DGNB’. Il tient compte des aspects environnementaux, écologiques, socio-culturels et économiques ; et s’intègre dans les processus de conception et de construction. Les critères sont élevés et touchent à nombreux domaines, comme la récupération de l’eau, la consommation d’énergie, la lumière naturelle ou encore la qualité de l’air.
Qu’est-ce que c’est la durabilité pour l’EPFL ?
L’EPFL a développé sa vision de la durabilité dans sa Stratégie Climat et Durabilité. Des actions ont été planifiées dans les domaines de l’enseignement, de la recherche et de l’innovation. Des objectifs ont été fixés sur les aspects énergétiques, d’émissions de CO2 et d’adaptation des espaces extérieurs. Dans le domaine de la construction, l’Ecole vient de publier son Masterplan pour la rénovation des bâtiments et infrastructures qui contribuera également à la durabilité du campus.
Concrètement, qu’est-ce que cela signifie ?
Un campus durable offre à toutes et tous un cadre agréable favorisant la santé mentale et physique, dans le respect de l’environnement. Il existe de nombreux projets d’économie d’énergie et de végétalisation comme celui d’arriver à 1000 arbres plantés. C’est à la fois bon pour le climat et le bien-être sur le campus. Autrement, l’EPFL utilise des énergies renouvelables et, depuis les années 80, se chauffe en grande partie grâce à l’énergie thermique tirée du lac Léman. Il y a deux ans, la rénovation de la centrale thermique a permis de s’affranchir de l’utilisation de mazout et de réduire les émissions CO2 de 1’400 tonnes par an.
Comment construire de façon durable ?
La durabilité touche à de nombreux aspects, tant qualitatifs (l’usage et la perception des espaces) que quantitatifs (les impacts écologiques mesurables). Pour construire durablement, il est nécessaire d’intégrer ces aspects dès le début du projet. L’orientation du bâtiment, le type d’espace ou encore la forme du bâtiment sont décidés très à l’amont. Une fois construit, il s’agit de maintenir en bon état tout en répondant aux besoins des utilisatrices et utilisateurs. Il faut aussi réduire la consommation d’énergie, notamment l’énergie d’exploitation (qui correspond au chauffage, à l’électricité et à l’eau chaude).
Comment avoir un bâtiment durable ?
D’abord il faut un bâtiment efficace, c’est-à-dire peu d’enveloppe par rapport aux surfaces utiles. Cela permet de réduire la quantité de ressources et d’énergie nécessaires pour maintenir de bonnes conditions de vie. Souvent nous sommes face à des arbitrages : toitures végétalisées riches en biodiversité ou maximisation du photovoltaïque ? Des grands vitrages qui apportent une belle lumière naturelle ou beaucoup de chaleur avec risque de surchauffe et d’éblouissement ? L’équilibre est important.
Le réemploi est en plein essor. Il permet de créer une économie circulaire qui ne consomme pas de nouvelles ressources. Même la question du transport des matériaux doit être considérée. Par exemple, il est courant d’utiliser des bétons avec agrégats recyclés mais ils doivent provenir de moins de 25km.
Quels sont les enjeux pour des constructions avec de la technologie de pointe ?
L’ASB est un bon aperçu. Les objectifs de durabilité restent les mêmes, mais ils sont atteints de façon différente. Il y a beaucoup de contraintes techniques dans ce bâtiment. Nous cherchons des matériaux qui consomment moins d’énergie et essayons de trouver des solutions spécifiques à chaque situation.
Des petits gestes pour réduire notre impact carbone sur le campus ?
Un grand domaine concerne le numérique : augmenter la durée de vie de nos appareils, éteindre les équipements scientifiques, repenser le stockage des données et utiliser l’IA de manière mesurée. Aussi, tout simplement ce qu’on fait chez soi comme éteindre les lumières en sortant d’une pièce. S’assurer d’un campus durable à l’avenir nécessite l’implication et les idées de toutes et tous. Être bienveillant et veiller les unes et les uns sur les autres fait aussi partie de la durabilité.