Kenza, originaire du Maroc, étudie la microtechnique à l’EPFL depuis 4 ans. Laura est dans sa dernière année de master en génie des matériaux. Enfin, Lilou est dans sa 3ème année de bachelor de chimie.
Selon les statistiques, il y a environ 30 % d’étudiantes en microtechnique et matériaux. Dans la section chimie, elles sont plus nombreuses et il y a une parité.
Pourquoi avez-vous choisi des études scientifiques ?
Laura (L) : J’ai toujours préféré les sciences à la littérature et, depuis petite, j’avais envie de créer des choses. L’ingénierie s’est donc imposée comme un choix naturel.
Kenza (K) : Je savais que je me dirigerais vers une filière scientifique, surtout parce que mes deux parents travaillent dans le domaine médical. J’ai toujours adoré bricoler, ce qui correspond bien à la science.
Lilou (Li) : Ma prof de chimie au lycée était vraiment exceptionnelle, et c’est elle qui m’a encouragée à poursuivre dans cette voie.
Avez-vous eu des rôles modèles?
L : Je n’avais pas de modèle spécifique, mais il y a beaucoup de femmes dans ma section, ce qui crée un sentiment d’entraide. Voir des femmes dans des postes scientifiques lors de portes ouvertes ou sur des sites web aide aussi à ouvrir le dialogue et peut encourager les plus jeunes.
K : Je n’y avais jamais vraiment réfléchi… En fait, je ne connaissais aucune femme ingénieure. J’ai eu principalement des modèles masculins et longtemps associé le statut de ‘docteur’ aux hommes. Aujourd’hui, on parle davantage des femmes qui ont créé ou inventé des choses mais n’ont pas reçu le crédit mérité. C’est essentiel pour les futures générations, mais ce n’était pas le cas quand j’ai choisi mon cursus.
Li : C’est inspirant de voir des femmes réussir dans des carrières scientifiques. On peut avoir des doutes liés à la vie de famille ou aux enfants, et voir des femmes surmonter ces défis est encourageant.
Lors de travaux en équipe avec des étudiants, constatez-vous des différences ?
K : D’après mon expérience, la partie organisationnelle me revient systématiquement. De plus, quand il s’agit de faire un poster ou une présentation esthétique, c’est souvent vers moi que se tournent les regards. J’ai aussi toujours été la seule femme dans mes groupes de travail.
Li : Lors de mes stages en laboratoire à l’EPFL, j’ai constaté des différences. Si la parité est respectée en chimie au niveau des études supérieures, elle diminue au niveau doctoral.
Et en activités extracurriculaires ?
K : Lors de mon stage d’usinage obligatoire en bachelor, j’avais l’impression que l’encadrant nous considérait, les femmes, comme ‘moins douées’. Il a même fait une partie du travail pour lequel j’étais évaluée, ce qui n’était pas le cas pour les étudiants masculins.
L : J’étais membre de la Racing Team. La première année, j’ai ressenti que certains m’écoutaient moins parce que j’étais une femme, mais d’autres ont soutenu et valorisé ma parole, ce qui est crucial. En tant que Team Leader, j’ai remarqué que mes coéquipiers se confiaient plus facilement à moi, parfois sur des aspects très personnels. Je ne suis pas certaine que cela aurait été le cas avec un homme.
Li : Lors des séries d’exercices, je remarque que les assistants viennent plus souvent vers nous, les femmes, ce qui est plutôt positif. Cependant, j’ai déjà ressenti des attitudes légèrement condescendantes de la part de certains hommes, qui insistent pour expliquer des concepts que nous avons pourtant bien compris.
La parité est-elle importante selon vous ?
K : Il faut aller au-delà de la simple parité. Dès l’enfance, les filles reçoivent des poupées et les garçons des voitures. Les sciences ne sont pas encouragées chez les filles dès le plus jeune âge. La parité doit être le résultat d’un changement de mentalité. Certains parents craignent que leur fille ne s’affirme pas dans un cursus scientifique jugé masculin, ce qui pourrait nuire à leur future carrière.
L : Je partage cet avis. En tant qu’assistante-étudiante au SPOT, je trouve que la règle de parité pour le recrutement a du sens, car il y a autant de candidats qualifiés des deux sexes. Cependant, dans le milieu professionnel, je trouve discriminant d’être embauchée parce que je suis une femme. Je préfère être reconnue pour mes compétences.
Li : Oui, il n’y a aucune raison qu’il y ait plus d’hommes que de femmes dans certains domaines. Les affinités se précisent en grandissant, mais elles ne devraient pas être dictées par le genre.